La fille du directeur de cirque
Petter pose sur le monde un regard cynique et se réfugie dans les histoires qu’il invente. Il déborde d’imagination et est obligé de coucher sur le papier ce foisonnement permanent de nouvelles histoires pour désencombrer sa tête. Petter est conscient de son talent mais il ne recherche aucunement la reconnaissance. Il pourrait devenir écrivain mais cela ne l’intéresse pas, il ne cherche pas la célébrité et aurait plutôt tendance à exécrer le monde futile des écrivains et des éditeurs. A cours d’argent, il décide pourtant d’utiliser ce précieux don, tout en restant dans l’ombre : il devient " Aide-écrivain ", vendant aux auteurs en mal d’inspiration des scénarios d’histoires plus ou moins élaborés. Homme auréolé de mystère, ses amours sont tout aussi dénuées d’ancrage dans le réel. Cumulant les aventures, scénarisant les ruptures, il aime un souvenir: celui de Maria, son seul amour, partie sans laisser de traces emportant avec elle un enfant à naître. La vie de Petter est une toile dont il a tissé les fils avec soin ; il doit maintenant veiller à ne pas lui aussi se faire prendre au piège.
Avec ce texte, je découvre Jostein Gaarder – oui oui j’étais passée entre les mailles du mondialement lu Monde de Sophie – et c’est une très agréable découverte. Il avait des points d’avance : il est norvégien et je suis une dévoreuse de littérature du Grand Nord. Puis j’avais entendu parler de ce livre voilà près de deux ans, lors d’un café littéraire, par un lecteur subjugué. Sa présentation avait intrigué plusieurs d’entre nous : il nous avait vraiment donné envie de le lire. Puis j’avais oublié le titre mais ayant depuis rencontré ce lecteur, je me suis empressée de me renseigner et j’ai bien fait ! D’abord le héros désabusé et intrigant me plaît, le regard qu’il jette sur une société de l’apparence me parle. Il est pourtant parfois désagréable, tellement sûr de lui et de son talent, tellement calculateur mais il a également quelque chose du héros romantique : celui qui n’aimera jamais qu’une seule femme, dut-il ne jamais la revoir.
L’autre intérêt de ce roman est qu’il regorge d’histoires : Petter s’en raconte, les partage avec ses proches et connaissances et vend les autres. Le livre est émaillé de ses contes, nouvelles, scénarios de romans. Et derrière ce héros à l’imagination fertile, on ne peut que saluer l’auteur qui semble lui aussi en avoir plein la tête !
Vous dire que je l’ai lu il y a peu, nonchalamment étendue dans le transat d’un hôtel quatre étoiles (le chikungunya peut parfois faire des heureux…) avec le lagon pour horizon (d’accord là je frime !) vous énerverait peut-être mais surtout que cela ne vous enlève pas l’envie d’aller rencontrer La fille du directeur de cirque.
La fille du directeur de cirque de Jostein Gaarder. Ed. Points/Seuil