Oeil-de-chat
A l’occasion d’une rétrospective de son travail de peintre, Elaine Risley revient à Toronto, la ville de son enfance, qu’elle a quitté précipitamment lorsque son mariage s’effondrait. En suivant le fil des souvenirs d’Elaine, on comprend que ce départ était une fuite nécessaire à sa construction, un besoin de tourner le dos à un passé qui hante tout le récit. Elaine se souvient de la petite fille qu’elle était, une enfant qui avait du mal à trouver sa place. Pourtant, vu de l’extérieur, Elaine avait l’air d’une petite fille comme les autres, entourée d’amies. Mais les amitiés peuvent se révéler terribles quand la domination marque les relations. Cordelia, sa meilleure amie, incarnait aussi sa pire ennemie, la traitant avec mépris et méchanceté, se jouant de cette petite fille un peu effacée. Il y a eu aussi Grace et sa famille qui avait décidé de lui inculquer un peu de religion : un investissement total pour Elaine et une foi qui vole en éclats lorsque les masques tombent au détour d’une conversation. Dans cette enfance, Elaine se débat et petit à petit apprend elle aussi à manier les maudites armes de ses amies et à les retourner contre celles-ci. Mais Elaine a beau avoir « pris le dessus » sur Cordelia, elle ne sent pas pour autant apaisée. Et cette amitié si particulière, distendue avec les années mais toujours présente (elles se croiseront encore de loin en loin), habite Elaine en permanence. De sa vie, la narratrice évoque aussi les amours, les années d’apprentissage dans les cours de dessin, le départ de Toronto, sa construction d’artiste et de femme. Et aussi la genèse d’une œuvre, profondément marquée par la vie d’Elaine.
Œil-de-chat dresse un beau portrait de femme qui s’interroge sur ce qui a fait sa vie en replongeant dans le passé. Il narre les renoncements nécessaires à la construction de soi, les luttes intérieures, les blessures de l’enfance et de la vie en général, les victoires mais aussi les fantômes d’une femme qui a traversé sa vie et son époque non sans une certaine ténacité.
Œil-de-chat de Margaret Atwood (traduit de l’anglais (Canada) par Hélène Filion). Editions Robert Laffont, coll. Pavillons Poche/ 2011.
Titre original : Cat’s eye. Première édition originale en 1988/ 1ère édition française chez Robert Laffont en 1990.
Merci à Blog-O-Book et aux éditions Robert Laffont pour la découverte de ce titre de Margaret Atwood, un auteur que j'ai envie d'aller découvrir plus avant.