Le quotidien de Sam est réglé comme une horloge, entre son boulot de garçon de salle dans un pub de nuit et son appartement tristounet. Le dos courbé, il traverse une ville qui semble l’écraser sous un ciel qui n’a de cesse de verser ses larmes. De ses voisins, il ne connaît rien que des regards par des portes entrebâillées. Un jour, alors qu’il s’apprête à boire un café bien chaud, une goutte, puis une autre tombent dans sa tasse. Sam décide d’aller voir son voisin du dessus pour lui signaler la fuite. Le drôle de petit bonhomme qui lui ouvre le prend aussitôt pour son fils. Sam tente bien d’expliquer la méprise mais rien n’y fait. Tout à son bonheur de retrouver enfin ce fils parti si longtemps et dont il n’a plus de nouvelles, il l’invite à prendre un verre. Mais Sam fuit cette solitude faussement comblée qui lui rappelle tant la sienne. Et se réfugie dans les bras de Lili, sa petite amie danseuse, la petite touche de couleur et de lumière de sa vie. Mais cette drôle de rencontre continue de le hanter, réveillant ses propres fantômes. J’ai pioché cette bande-dessinée un peu par hasard, attirée par le dessin que je trouve sublime. Et quelle belle surprise ! Belle illustration de l’ « ultra moderne solitude » des villes, d’un quotidien sans couleurs où les êtres évoluent, pauvres poupées mécaniques, à côté de la vie, la vraie - celle qui fait battre les cœurs, celle où l’on ose la rencontre avec l’autre, celle où l’on n’a pas peur des sentiments - cette bande-dessinée est aussi lumineuse. Parce qu’une simple rencontre peut parfois changer une vie, y redonner goût, fêler les carapaces que l’on a endossées pour se protéger. Une belle preuve de tout cela avec Le Jardin d’Hiver qui allie magnifiquement poésie de l’histoire et virtuosité des illustrations. A découvrir !
Le Jardin d’Hiver de Renaud Dillies et Grazia La Padula. Editions Paquet (2009)
La critique de Jean-Bernard Vanier sur Planète BD