La cinquième saison

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Quatre saisons et cinq nouvelles pour dire l’adolescence, ses maux et ses petits bonheurs, ses coups aux cœur et ses découvertes. Cinq auteurs pour évoquer les changements et les premières expériences et faire découvrir aux lecteurs ados un genre, finalement peu répandu dans les lectures scolaires : la nouvelle. Un joli regard sur l’adolescence par des auteurs que, par ailleurs, j’aimais déjà beaucoup (à part Jérôme Lambert que je ne connaissais pas).

 

PRINTEMPS :

Pas de printemps pour Charlie d’Arnaud Cathrine

«  - Etant donné que je suis crevé et qu’il fait un temps de merde, je resterais bien chez toi à bouquiner... 

C’était la première phrase construite avec plus de deux mots dans laquelle je m’aventurais. Jacques parut la recevoir comme un feu d’artifice dont on a manqué le début : son visage s’illumina, il abandonna au milieu du salon ses programmes culturels et proposa d’aller faire un café avec un allant que je ne lui connaissais pas. Il ne prit pas la peine de me demander si j’aimais ce breuvage, considérant manifestement qu’il s’était mépris sur les adolescents et que je ressemblais presque à un modèle adulte, autrement dit : un individu potentiellement fréquentable et de bonne compagnie. »

 

Charlie vient d’arriver à Paris, dans le petit appartement de son oncle qu’il connaît si peu. Un week-end pas vraiment choisi, imposé sans explication par son père. Pourquoi cette destination inattendue, auprès de cet oncle dont on évite de parler dans la famille ? Jacques, l’oncle et Charlie, le neveu, ne savent pas comment composer avec cette proximité subite. Mais ces quelques jours vont permettre à Charlie de découvrir une vie à mille lieux de celle de son père. Jacques, écrivain, a une « vie trop libre » aux yeux de sa famille tandis que Charlie est élevé par un père militaire et les conflits entre les deux frères ne manquent pas d’éclater lors des rares repas familiaux qu’ils partagent. Mais ce que Charlie va aussi découvrir, c’est que son oncle a un grand secret…

 

ETE

Un été Chez Vous d’Agnès Desarthe

« Avant de m’endormir, je me demande pour la millième fois ce qui cloche chez moi. Mes parents sont tellement gentils, tellement attentionnés, tellement serviables. L’été dernier, ils avaient essayé de me caser chez mes grands-mères, mais ça n’a pas marché. J’ai failli les rendre folles. J’ai explosé mon forfait en appelant ma mère à tout bout de champ. J’ai arrêté de manger. J’ai menacé de m’enfuir. Du coup, cette année, ils sont résignés. Ils vont donc emmener leur grande fille de quatorze ans au travail, comme certains y amènent leur bébé quand la nourrice est malade. Dans mon cas, c’est plus grave, parce que à mon âge je devrais me débrouiller toute seule. Dans mon cas, ce n’est pas la nourrice qui est malade, c’est moi. Je suis traversée de tant de pensées morbides que, si je restais seule à la maison, je risquerais de provoquer un accident domestique pour me donner raison. »


Depuis trois ans, Nora vit dans l’angoisse. De tout et de rien. Elle dresse sans cesse des listes et imagine le pire dès que ses parents mettent le nez dehors. Elle ne parvient pas à comprendre pourquoi elle angoisse à ce point et l’explication de Madame Rouget, son médecin traitant, ne la satisfait guère : « tu es extraordinairement créative ! ». Oui ben pas facile de vivre avec cette imagination débordante, et encore moins lorsqu’arrivent les vacances. Cette année, c’est décidé, Nora accompagnera à tour de rôle ses parents au boulot : une agence immobilière, Chez Vous, pour sa mère et une agence du Crédit Commercial du Nord pour son père. Et là, Nora va découvrir le mensonge et une autre facette de ses parents. Parce que pour vendre un appartement, c’est plus facile d’omettre certains détails ou d’user de superlatifs… Parce qu’en bossant essentiellement avec des femmes, son père se transforme en coq de basse-cour… Heureusement, il y a aussi dans l’histoire un marchand de cahiers qui devrait l’aider à croire de nouveau en l’humanité.

 

AUTOMNE

Une plage en novembre d’Olivier Adam

« Je suis remontée me coucher. Je me suis allongée sur son lit, glissée sous les draps. On l’y avait trouvé mort et j’ignore s’ils avaient été changés. J’ai fermé les yeux et je l’ai imaginé, étendu là, ainsi que je le trouvais parfois, lorsqu’il écoutait sa musique, juste un peu plus raide, pâle et figé. J’ai dormi d’un sommeil sans rêves. Juste avant de sombrer, j’ai pensé à cette expression : lit de mort. Grand-Pa avait dormi là durant trente ans. C’était surtout un lit de vie, au fond. »


Claire revient avec sa mère dans la maison de son grand-père, mort il y a peu. Elle observe avec un certain dégoût les adultes vider cette maison pleine de souvenirs de vacances heureuses au rythme de la mer. Dans les cartons remplis d’objets, c’est aussi son enfance qu’elle laisse. Espérant revoir Alex, son amoureux des dernières vacances, la jeune fille va découvrir le dernier amour caché de son grand-père.

 

HIVER

Bonne année toi-même de Jérôme Lambert

 « (…) tout le monde dit toujours « Je déteste attendre ». Comme si on avait le choix. Genre ma nature ne supporte pas l’attente, vous comprenez, le commun des mortels peut attendre si ça lui chante, mais moi non, impossible, je  ne suis pas compatible avec ce supplice et c’est un affront que je prends pour personnel parce que je suis toujours à l’heure. Si je peux donner ici un avis public, je pense qu’il serait quand même beaucoup plus simple pour tout le monde que les gens ponctuels prennent rendez-vous entre eux, et que les toujours en retard ne fréquentent que des toujours à la bourre. »


Ah l’amour ! il peut nous faire trépigner d’impatience. Chez lui, suspendu à la sonnerie du téléphone, un jeune homme attend, des questions plein la tête, de fêter avec sa petite amie leur premier réveillon de la Saint-Sylvestre en tête-à-tête.

 

CINQUIÈME SAISON

La reine a fait faire un bouquet de Geneviève Brisac

 « Je suis sûre d’être muette à vie. Il va falloir que j’en tienne compte pour le choix de mon futur métier. Il y a peu de carrières évidentes pour les muets comme pour les mouettes. Pour le moment, je veux être biologiste et poète, je crois que cela ne pose pas de problème, et puis au fond j’ai l’espoir que ma voix reviendra dès que nous quitterons cet endroit trop inquiétant pour moi, trop de tout ici, trop de nature, trop de garçons, trop de sentiments, trop de peau exhibée, trop d’inquiétude, trop de scorpions et de cafards géants, trop de changements. Je n’aime pas le changement. Personne ne comprend. Mais je sais que j’ai profondément raison, les changements sont presque toujours un pas vers la mort, on devrait essayer de ne presque jamais rien changer, de ne jamais rien bouger. Même pas un cil. »


Akka ne parle plus, perdue dans les vacances entre ses parents et un couple d’amis dont la nudité l’exaspère. Elle observe, mutique, les petits gestes qui en disent long, qui en disent trop. Alors elle se refugie sur un rocher, loin du bruit des autres avec pour compagnon un livre et aussi Oreste, qui n’est finalement pas si con pour un garçon.

 

NB : cette dernière nouvelle apparaît aussi dans le recueil de Geneviève Brisac : Les filles sont au café (52 ou la vraie vie pour la parution grand format). D’où mon impression que j’étais un peu zinzin en lisant à quelques jours d’affilée les 2 nouvelles dans 2 livres différents ;-)

 

 

 

La cinquième saison d’Agnès Desarthe, Arnaud Cathrine, Olivier Adam, Jérôme Lambert et Geneviève Brisac. Editions L’école des Loisirs, coll. Médium/ 2007.

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L
<br /> <br /> Que de très bons auteurs là dedans... J'espère que tu vas bien l'encreuse... (j'aime beaucoup ta nouvelle présentation... )<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br /> <br />
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V
<br /> <br /> Oh merci l'or des chambres! A vrai dire, je m'y fais à cette nouvelle présentation. Il faut quand même que je fasse quelque chose pour la bannière et ce sera vraiment bien!<br /> <br /> <br /> Sinon, ça va, pas eu de vraies vacances mais réussi à grapiller du temps par ci par là mais cette semaine, les choses sérieuses recommencent!<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> Desarthe, Adam, Brisac... Trois valeurs sûres pour moi qui suffisent à me donner le goût de cette lecture!<br /> <br /> <br /> Je le note de suite dans mon panier Ama***.<br /> <br /> <br /> <br />
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V
<br /> <br /> Tout à fait, je me suis dit la même chose en piochant à la médiathèque! Et d'ailleurs ce sont les trois nouvelles de ces auteurs qui m'ont le plus touchée.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Je l'ai lu mais je l'ai trouvé trop ciblé jeunesse.<br /> <br /> <br /> Je te conseille un autre recueil de nouvelles pour adultes "mots pour maux " avec comme auteurs : Georges-Olivier Châteaureynaud, Marie-Ange Guillaume, Françoise Vallejo, Mathieu Terence,<br /> Delphine de Vigan,Martin Winckler, Diane Meur, Boualem Sansal, Dominique Sylvain, Grégoire Polet, Michèle Fitoussi, Martin Page, Léonora Miano, Franz Bartelt, Anne Bragance, Vincent Delecroix,<br /> Sylvie Germain et  Philippe Claudel...!!!!!<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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V
<br /> <br /> Ah ben oui mais... c'est un livre jeunesse. Je lis énormément de romans de cette collection et j'aime beaucoup la littérature jeunesse, même si parfois certains titres me paraissent un peu<br /> complexes pour les tranches d'âge recommandés.<br /> <br /> <br /> Je note avec enthousiasme le recueil que tu me conseilles! 1/ parce que j'aime beaucoup les nouvelles. 2/ parce que la pleïade d'auteurs y figurant est plus qu'alléchante et prometteuse. 3/ parce<br /> que tu es de bon conseil! ;-)<br /> <br /> <br /> <br />